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Historique de la chimiothérapie

Le terme de chimiothérapie désigne toutes les méthodes de traitement basées sur la chimie que ce soit dans le traitement d’un cancer ou de toute autre maladie. Les oncologues préfèrent plutôt parler de chimiothérapie cytotoxique.

La plupart de ces molécules ont été découvertes dans la seconde moitié du XXème siècle. Il s’agit de substances présentes naturellement chez certaines espèces (bactéries, végétaux, ou même éponges marines). Pour certaines, on s’est inspirer de ces molécules, mais on a artificiellement modifié leur structure pour les rendre plus efficaces ou pour limiter les effets secondaires.

Une molécule de chimiothérapie cytotoxique doit permettre de détruire les cellules cancéreuses. Elles peuvent agir soit sur l’ADN (directement ou indirectement), soit sur les microtubules qui constituent le « squelette » de la cellule. On les classes en plusieurs familles selon leur cible dans la cellule (Tableau I). De façon générale, les chimiothérapies agissent surtout sur les cellules qui se divisent le plus vite comme les cellules tumorales parce qu’elles se divisent vite, mais aussi parce qu’elles arrivent moins bien à réparer les dégâts causées par le traitement que les autres cellules. Quand la molécule s’attaque aussi à des cellules saines, elle peut provoquer des effets secondaires. Par exemple, les cellules qui permettent la pousse des cheveux se divisent rapidement, elles sont donc touchées par un certain nombre de chimiothérapies cytotoxiques.

Depuis quelques années il existe de nouveaux médicaments qui associent un anticorps sur lequel on fixe des molécules de chimiothérapie cytotoxique (antibody-drug conjugate). Ainsi, l’anticorps se fixe sur sa cible à la surface des cellules tumorales et les molécules de chimiothérapie sont libérées dans la cellule.

Le choix du traitement dépend de plusieurs facteurs qui sont pris en compte par les oncologues selon les données actuelles de la science : les caractéristiques de la maladie cancéreuse et bien sûr la situation médicale des patients (antécédents, état général, etc…)

Quelques dates

• 1943, découverte accidentelle de la toxicité hématologique des gaz moutarde conduisant aux premiers essais thérapeutiques en utilisant la méchlorméthamine dans le traitement de la maladie de Hodgkin et des syndromes lymphoprolifératifs.
• 1948, utilisation de l’aminoptérine dans la leucémie aiguë lymphoblastique de l’enfant.
• 1950, découverte du cyclophosphamide.
• 1953, découverte du méthotrexate et association au purinéthol dans les premiers essais cliniques de traitement de la leucémie aiguë lymphoblastique.
• 1956, guérison de choriocarcinome avec le méthotrexate ; utilisation du 5-fluorouracile dans les cancers digestifs, du sein et de la sphère ORL.
• Les années 1960, étude de la cinétique cellulaire et tumorale.
• Les années 1970, années fastes de la chimiothérapie avec le développement des alcaloïdes de la pervenche, de la procarbazine, des anthracyclines et du cisplatine améliorant ainsi le traitement des leucémies aiguës lymphoblastiques, de la maladie de Hodgkin, du cancer du sein et des tumeurs germinales.
• Les années 1980, publication des grands essais cliniques menés sur de longues périodes permettant de valider les stratégies thérapeutiques actuelles, les travaux les plus marquants étant dans le cancer du sein ; mise en évidence de l’hétérogénéité tumorale et des phénomènes de résistance ; développement de nouvelles molécules :
– Analogues moins toxiques (ex. épirubicine moins toxique que l’adriamycine ; carboplatine moins toxique que le cisplatine)
– Analogues structuraux (ex. vinorelbine analogue des alcaloïdes de la pervenche ; oxaliplatine analogue du cisplatine)
– Nouvelles classes : les taxanes (paclitaxel, docétaxel), les inhibiteurs de la topo-isomérase 1 (irinotécan, topotécan).

Mécanisme d’action et modalités d’administration

Mécanisme d’action

On peut utiliser les chimiothérapies de différentes façons : elles peuvent être utilisées seules, avec une association de plusieurs chimiothérapies ou en association avec d’autres traitement comme des thérapies ciblées ou des immunothérapies. Elles peuvent être administrées par voie orale, par voie intraveineuse (la plus fréquente), et dans certain cas directement dans l’organe qu’on souhaite traiter.

Tableau 1. Classification des différentes molécules de chimiothérapie

Famille Molécules Cibles cellulaires
Anthracyclines/Anthracènediones Doxorubicine, Epirubicine, Idarubicine, Mitoxantrone Topoisomérase II, ADN
Inhibiteurs de la topoisomérase I Irinotécan, Topotécan Topoisomérase I, ADN
Antimétabolites 5-fluorouracile, Méthotrexate, Mercaptopurine, Fludarabine, Cytarabine, Gemcitabine, Capécitabine, Pemetrexed Bases puriques et pyrimidiques
Alkylants Cyclophosphamide, Melphalan, Ifosfamide, Busulfan ADN
Poisons du fuseau Vinorelbine, Vincristine, Vindésine, Vinblastine, Docétaxel, Paclitaxel Tubuline
Sels de platine Carboplatine, Cisplatine, Oxaliplatine ADN

Modalités d’administration

Les traitements intraveineux sont administrés en hôpital de jour. Ils peuvent être toxiques pour les petites veines. C’est pourquoi, on pose, sous anesthésie locale, une chambre implantable avant le début du traitement. Il s’agit d’un petit boitier qu’on installe sous la peau à la partie supérieure du thorax (comme un pace-maker).

Effets secondaires de la chimiothérapie

Au cours d’un traitement par chimiothérapie cytotoxique des effets secondaires peuvent survenir. Comme pour tout médicament les effets secondaires sont variables d’un individu à l’autre. La plupart de ses effets secondaires peuvent être prévenu et/ou soulagés par des médicaments.

La toxicité aiguë

La toxicité aiguë est une toxicité immédiate survenant dans les heures ou les jours suivant l’administration de la cure. Les toxicités aiguës sont généralement réversibles et leur intensité dépend de chaque molécule. Les toxicités aiguës les plus fréquentes sont d’ordre hématologique, digestif, urinaire, cutané, neurologique, allergique et inflammatoire.

Toxicité hématologique

La toxicité hématologique est la plus fréquente :
• La diminution des globules blancs, leucocytes et polynucléaires neutrophiles, (leucopénie et neutropénie) augmente le risque d’infections.
• La diminution des globules rouges (anémie) accroît l’asthénie et la fatigue.
• La diminution des plaquettes (thrombopénie) majore le risque hémorragique.
La toxicité hématologique peut nécessiter des réductions des doses d’un ou plusieurs cytotoxiques et/ou un allongement du délai entre les cures de chimiothérapie.

Il existe des moyens pour prévenir ou corriger cette toxicité : ce sont les facteurs de croissance hématopoïétiques avec principalement le G-CSF pour les globules blancs. L’anémie peut être corrigée soit par des transfusions et dans certaines indications par l’érythropoïétine (EPO). La thrombopénie, si elle fait courir un risque hémorragique important, sera corrigée par transfusions.

Les troubles digestifs

Ils peuvent être de plusieurs natures :
Les nausées et les vomissementsque l’on peut prévenir avec des molécules de plus en plus performantes.
Les mucitescorrespondant à une inflammation de la muqueuse buccale pouvant se surinfecter soit par des champignons, soit par des bactéries. Les mesures préventives relèvent de l’hygiène locale associées à un des bains de bouche à titre prophylactique.
Les diarrhéesque l’on peut prévenir par une hygiène alimentaire adaptée et soulager avec des traitements simples de type lopéramide.
La constipationque l’on peut prévenir par une hygiène alimentaire adaptée et soulager par des laxatifs.

Toxicité sur le système urinaire

Ces traitements ne sont donc pas réalisé en hôpital de jour mais en hospitalisation complète.
La toxicité rénale – Les principales molécules impliquées dans la toxicité rénale sont le cisplatine et le méthotrexate. La toxicité rénale est prévenue en établissant une diurèse alcaline et en utilisant des molécules appartenant à la famille des thiols.
La toxicité vésicale– L’inflammation de la vessie se rencontre principalement avec le cyclophosphamide et l’ifosfamide. Cette toxicité est prévenue en utilisant le Mesna.

Toxicité cutanée

L’alopécie– C’est une toxicité très fréquente à des degrés variables. Elle peut être prévenue par la mise en place de casque réfrigérant avant et pendant l’administration de la chimiothérapie, ainsi que par certaines mesures simples de soin des cheveux tels que l’arrêt des permanentes et des couleurs pendant cette période.
• L’onycholyse – Il s’agit de l’altération des ongles dont la principale molécule impliquée est le docétaxel. On recommande l’utilisation d’un vernis à ongle au silicium pour éviter cet effet secondaire.

Le syndrome main-pied– Il s’agit d’une irritation voire d’une desquamation plus ou moins importante au niveau de la paume des mains et de la plante des pieds. La prévention repose sur des mesures d’hygiène locale et une hydratation adaptée de la peau. Les principales molécules responsables de ce syndrome sont la capécitabine et les doxorubicines liposomales.

Toxicité neurologique

Neuropathie périphérique– Les principales molécules à l’origine de neuropathies périphériques sont l’oxaliplatine, le paclitaxel et le docétaxel.
L’ototoxicité– Cette toxicité auditive est retrouvée avec le cisplatine.

Réactions allergiques et inflammatoires

Allergie– Les réactions allergiques sont généralement imprévisibles et doivent être immédiatement signalées. Cependant, certaines molécules comme la paclitaxel sont connues pour être à l’origine d’allergie et une prévention d’emblée est faite par des antihistaminiques classiques.
Rétention hydrosodée– Ce phénomène est observé principalement avec le docétaxel pour lequel chaque cure est précédée et suivie d’un traitement par corticoïdes permettant d’éviter cette réaction.

La toxicité retardée

Les toxicités retardées apparaissent plusieurs mois ou année après la chimiothérapie. Parmi les toxicités retardées les mieux identifiées, on retrouve :
La toxicité cardiaque à type d’insuffisance cardiaque congestive observée après anthracyclines. Chez des patients présentant ce type de troubles cardiaques préalablement au traitement, celui-ci sera modifié pour ne pas aggraver la pathologie cardiaque. D’autre part, certaines molécules peuvent prévenir l’apparition de cette cardiotoxicité comme le dezrazoxane.
Les leucémies et myélodysplasiessecondaires au cyclophosphamide et aux anthracyclines. Elles sont relativement rares et actuellement, il n’y a pas de moyen de les prévenir ou de prévoir quel patient serait plus susceptible de développer ce type d’atteinte hématologique.
La fibrose pulmonaireaprès bléomycine.
l’hypofertilité: la chimiothérapie peut conduire à une stérilité par atteinte directe du système de reproduction aussi bien masculin que féminin. La chimiothérapie peut être toxique pour le fœtus au cours des trois premiers mois de grossesse.